jueves, 7 de febrero de 2019

Appel à la solidarité avec le mouvement populaire en France dit "des gilets jaunes"


Depuis plus de 2 mois, un mouvement social d’un type nouveau secoue la France. 

 
Des centaines de milliers de personnes, essentiellement des classes populaires (travailleurs pauvres ou moyens, chômeurs, intérimaires, retraités, …), se sont retrouvés pour occuper spontanément les espaces publics (et notamment les « rond points » à l’entrée des villes et des villages), exprimer leur colère et chercher à dépasser le système politique actuel. Ces milliers de personnes ont retrouvés des techniques de luttes qui sont familières aux anarchosyndicalistes : décisions en assemblées, refus des chefs / leaders / représentants, action directe (c’est-à-dire action directement par les gens en lutte, et donc sans partis politiques, sans syndicat ou autres organisations extérieures à l’assemblée qui serait intermédiaire entre l’assemblée de lutte et le Pouvoir qu’elle combat [Etat, gouvernement, patron]), action en dehors du cadre réglementaire et légal de l’Etat, diversité des tactiques et mobilité. Pour s’identifier, les personnes en lutte ont adopté le « gilet jaune », symbole universel qui met tout le monde à égalité, et qui donne de la visibilité à ceux que le Pouvoir ne veut pas voir, les pauvres, les exclus du système capitaliste et de la mondialisation. Le Patronat s’inquiète de l’impact de ce mouvement sur l’économie, qui se chiffre déjà en milliard d’euros et qui a permis d’obtenir en 2 mois plus d’avancées sociales que toutes les élections syndicales ou politiques et les manifestations routinières des syndicats depuis plus de 20 ans.

Vous avez surement vu les films et les photos des affrontements entre les gilets jaunes et la police anti émeute. Ces images sont certes spectaculaires, on peut même parler d’insurrection à Paris le 1er décembre ou chaque week-end à Toulouse 1. Toutefois, évitons l’hypnose des images. Ce qui est vraiment important dans ce mouvement ce ne sont pas ces images de bataille qui passent en boucle sur internet ou sur les télés, mais plutôt le fait que des centaines de milliers de personnes ont pris l’habitude de se retrouver régulièrement en assemblée pour décider par elle-même, sans parti ou organisation extérieure, et pour élaborer leur propre politique.

C’est ce moment de prise de conscience massive de notre capacité d’action autonome que craint le Pouvoir, plus encore que les violences spectaculaires. Plus les semaines passent et plus la révolte, qui au départ portait uniquement sur une question de taxe sur le carburant, s’est étendue et pourrait déboucher sur une remise en cause globale du système. Pour casser ce mouvement qui débute, le Pouvoir essaie toutes les armes à sa disposition : il d’abord essayé de dire qu’il s’agissait d’un mouvement d’extrême droite, aidé en cela par la majorité des organisations libertaires ou gauchistes qui sont tellement coupées de la classe des travailleurs qu’elles sont incapables de reconnaitre la nature de classe de ce mouvement. Il est vrai que – dans certains villes - des racistes ont essayé de manipuler le mouvement au début, mais pour le moment ils ont été mis en minorité et même parfois violemment expulsés des manifestations. Ensuite le gouvernement a essayé de calmer les esprits en annonçant quelques subventions pour les salaires les plus faibles. Mais cette mesure était tellement décalée avec la réalité sociale qu’elle a été ressentie plus comme une humiliation. Il ne reste alors plus au gouvernement, à l’Etat et au Capitalisme qu’à montrer leur vrai visage : celui de la violence (dont l’Etat dispose du monopole légitime) et rappeler que le capitalisme fonctionne sur un système de domination des forts sur les faibles. Ainsi, depuis le début du mouvement ce sont plusieurs milliers de révoltés qui ont été arrêtés et plusieurs centaines qui ont été condamnés à des peines de prisons très lourdes, souvent pour le seul crime d’avoir été présent dans la rue pour manifester. Les blessés se comptent par centaines, certains ont eu les mains, les pieds arrachés par des grenades explosives, d’autres ont eux les yeux ou les joues transpercées par des balles en caoutchouc.

Les militants de la CNT-AIT participent depuis le début au mouvement des gilets jaunes. Au départ nous sommes venus pour voir et comprendre. Et quand il est apparu que nous nous trouvions avec des gens qui partageaient nos pratiques assembléistes, sans représentants, refusant les partis politiques et les élections, demandant plus de justice sociale, il nous a semblé naturel de participer pleinement mais toujours dans le respect de nos principes anarchosyndicalistes. Notre intervention a aussi pour objectif d’éjecter les fascistes et autres parasites politiques nuisibles qui cherchent à utiliser ce mouvement. Nous joignons à ce courrier quelques textes traduit du numéro spécial de notre journal consacré à notre participation active au mouvement .

Nous ne savons pas comment va évoluer le mouvement. Mais il est certain qu ’il y aura des suites politiques.

Dans l’immédiat, il y a eu de nombreuses personnes arrêtées et condamnée ; qui sont en grande majorité des ouvriers, avec ou sans travail, et le plus souvent sans argent et isolées. Le devoir des anarchosyndicalistes est d’exprimer une solidarité en acte avec les condamnés et les prisonniers de la lutte sociale, d’exiger leurs libérations. C’est pourquoi nous lançons dès aujourd’hui un appel à la solidarité à tous les compagnons de l’AIT. Toute action de solidarité, même symbolique, est la bienvenue (sans qu’il soit nécessaire de vous mettre en danger bien sur !).

La violence c’est l’Etat et le Capitalisme !
Liberté pour les prisonniers de la révolte sociale !

CNT AIT France